Mythes du sionisme
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MYTHES DU SIONISME
Depuis plus d’un siècle, les tenants du sionisme ont bâti un arsenal idéologique fondé sur des mythes aussi faux que tenaces, afin de justifier l’occupation puis l’expansion en terre de Palestine. Leur doctrine, consolidée par des circonstances historiques tragiques (l’Holocauste), fait aujourd’hui apparaître Israël comme le David juif se battant contre le Goliath arabe dans la région. Rien de plus faux, rétorque Ronnie Kasril, figure historique de la lutte contre l’apartheid et membre du gouvernement. En tant que sud-africain, il sait reconnaître mieux que d’autres la logique d’expropriation des Palestiniens de leur terre et la nature raciste de l’ةtat d’Israël. En tant que Juif, Ronnie Kasril sait qu’il s’expose à l’accusation du premier des mythes de la propagande sioniste : l’antisémitisme. Eclairante, argumentée et pondérée, son analyse remet les pendules à l’heure.
par Ronnie Kasril
Vice-ministre de la Défense dans le premier gouvernement post-apartheid, ministre de l’Intelligence (Service secrets) dans le gouvernement actuel, Ronnie Kasril* a été l’un des principaux commandants de la branche armée de l’African National Congress (ANC). Figure charismatique de la lutte anti-apartheid, Kasril est membre de la communauté juive de ce pays, dont sont issus de nombreux militants et intellectuels qui ont combattu le régime raciste. Kasril a écrit ce texte à titre personnel et à l’attention du public sud-africain, avant l’invasion du Liban, afin de dénoncer l’idéologie sioniste et ses dérives. En 2005, à l’issue d’un voyage en Palestine, Kasril n’avait pas hésité à comparer l’Afrique du Sud sous l’apartheid à la situation que connaît le peuple Palestinien dans les territoires occupés. Il avait alors exigé que la communauté internationale en tire les mêmes conséquences en décrétant des sanctions contre Israël. Extraits.
« L’ état d’Israël est bâti sur un ensemble de mythes qu’il faut affronter et démonter, non sans courage, car toute critique expose son auteur au danger d’être accusé d’antisémitisme. Tenter d’analyser ces mythes peut en revanche servir à ouvrir un débat qui serait bénéfique à tous, en particulier à ceux qui ont la foi, aux croyants dont le sens moral se trouve érodé par la façon raciste dont l’ ة tat d’Israël traite les Palestiniens. Ouvrir ce débat ne peut qu’honorer ceux qui ont péri dans l’Holocauste, au lieu d’exploiter leur terrible souffrance pour justifier les injustices que subissent les Palestiniens.
Un des plus intolérables mythes du sionisme est de prétendre que toute critique d’Israël équivaut à de l’antisémitisme. Cette forme intolérante et bigote d’abus de langage refait constamment surface et vise à intimider aussi bien les Juifs que les non-Juifs. […]
L’essence du sionisme repose sur un mythe biblique qui suggère que le peuple juif a un droit divin sur la terre de Canaan, sa possession éternelle. Selon l’Ancien Testament, il s’agirait de la terre que Dieu a promise à Abraham pour ses descendants. Le droit divin du peuple juif sur cette terre est de nature essentiellement religieuse ; il découle de la Bible comme livre sacré, dont le contenu, transmis par tradition orale, est in fine le travail de scribes humains. […]
Un royaume juif a certainement existé dans les temps anciens dans cette région, comme de nombreux autres royaumes. Une pléthore de peuples a commercé et séjourné dans la région – Amaréens, Cananéens, Samaritains, Philistins et Hébreux. Les recherches historiques et archéologiques ont confirmé l’existence en Palestine de la civilisation de Canaan plus de 3 500 ans avant J.-C. Ce qui pose problème, c’est lorsqu’un groupe revendique un droit sur ce territoire tant de siècles après, sur la seule base de l’interprétation du livre sacré, sans tenir compte du fait que d’autres peuples aient pu y vivre entre-temps. Comme l’a affirmé l’éminent penseur juif Erich Fromm, « si toutes les nations devaient réclamer les territoires sur lesquels leurs ancêtres ont vécu 2 000 ans auparavant, ce monde serait un asile de fous ».
Les sionistes sont devenus des archéologues fervents et, depuis plus d’un siècle, ils ont retourné la Palestine afin de prouver l’existence du royaume uni de David et Salomon, qui aurait existé de 1000 à 992 avant J.-C. et qui constitue le fondement de leur revendication. Jusqu’à présent, les preuves recueillies sont insuffisantes. Ce que les recherches historiques ont révélé, c’est que, il y a 2 000 ans, sous l’occupation romaine, existaient trois composantes géographiques et politiques distinctes dans la région : la Samarie, la Galilée et la Judée, qui étaient en guerre les unes contre les autres.
Un deuxième mythe perpétue l’idée que les peuples juifs vivant en terre arabe ont souffert de la haine envers les Juifs. En réalité, les communautés juives ont prospéré et joui de longues périodes de coexistence pacifique, surtout lorsqu’on les compare avec ce qui s’est passé en Europe. Des documents historiques montrent d’ailleurs qu’il y avait une symbiose entre les Arabes et les Juifs donnant vie à ce que l’on pourrait appeler une tradition islamico-hébraïque. La découverte au Caire du trésor de Geniza – un ensemble de documents trouvés dans une synagogue du XIe siècle – a révélé que les communautés juives formaient une partie intégrante de la culture islamique.
Les sionistes affirment également que près d’un million de Juifs ont été victimes de nettoyage ethnique dans les pays arabes au cours du XXe siècle. En réalité, dans les premières décennies du siècle, ce furent les agents sionistes et les officiels britanniques qui ont cherché à déplacer les Juifs résidant dans les pays arabes vers la Terre sainte, comme élément d’une stratégie visant à augmenter le nombre de Juifs en Palestine. Plus tard, les Britanniques planifièrent d’échanger des Juifs vivant en Irak contre des Palestiniens expulsés par Israël. Une série de bombes explosèrent dans les zones juives d’Irak en avril 1950-1951, lorsqu’il devint évident que les Juifs n’avaient pas l’intention de quitter le pays. Des agents du Mossad et des réseaux sionistes étaient derrière cette campagne d’attentats.
L’assertion sioniste selon laquelle Israël était « une terre sans peuple pour un peuple sans terre » est un autre mythe largement diffusé. Le drame palestinien a commencé par l’expropriation des terres des Palestiniens au moment de la création de l’ ة tat d’Israël. Ben Gourion a joué à fond de ce mythe en prétendant que ces terres avaient été laissées à l’abandon pendant 2 000 ans. Cela rappelle l’affirmation selon laquelle l’Afrique du Sud était inhabitée lorsque Van Riebeck y a débarqué en 1652 !
Les archives historiques démontrent qu’une communauté arabe prospère vivait en Palestine avant la création de l’ ة tat d’Israël. Au moment de la déclaration de Lord Balfour, en 1917, il y avait approximativement 65 000 Juifs vivant en Palestine. Balfour a admis que les Arabes occupaient la région en déclarant : « Le sionisme est quelque chose de beaucoup plus important que les désirs des 700 000 Arabes qui habitent cette terre. » Le deuxième congrès sioniste en 1898 avait pour sa part reconnu que 650 000 Arabes vivaient dans la région, et l’écrivain juif Ahad Ha-am a reconnu, après une visite de trois mois en 1891, qu’il était « difficile de trouver des champs qui ne soient pas cultivés par les paysans arabes ».
Comparer l’installation des colons juifs à une guerre nationale contre le colonialisme est un autre mythe du sionisme. En réalité, ce qui est arrivé est exactement le contraire : il s’est agi d’une colonisation juive assortie d’un nettoyage ethnique qui a reçu l’appui des puissances impérialistes.
Le plan de partition de l’Onu de 1947, qui fut largement déterminé par le rapport de force de l’après-guerre et les sentiments suscités par la tragédie de l’Holocauste, offrit au peuple juif 56 % de la terre de Palestine, alors qu’il n’en possédait que 6,5 % à l’époque. Les 43 % restants furent alloués aux Palestiniens, alors que Jérusalem devait constituer une enclave internationale. Le fait que les Palestiniens aient ultérieurement accepté une réduction de leurs terres de 22 % par rapport à la Palestine historique a représenté un compromis exceptionnel de la part de leurs représentants, dont Yasser Arafat – même s’il est évident qu’il était surtout le reflet du rapport de force.
La prétendue « offre généreuse » de Ehud Barak à Camp David, en janvier 2001, ne portait en vérité que sur une partie du territoire qui avait fait précédemment l’objet d’un accord. De plus, l’offre était assortie de tant de restrictions sur la souveraineté palestinienne qu’Arafat ne pouvait pas l’accepter. Ce que Barak avait proposé se résumait en fait à un Bantoustan dans le style du Boputhatswana sud-africain, dont le territoire serait de surcroît morcelé, Israël gardant le contrôle absolu de la mer, du ciel et des frontières terrestres. Il est significatif de noter à quel point la « magnanimité » de Barak a été immédiatement mythifiée par la propagande sioniste.
Le sionisme a contribué à consolider la domination coloniale britannique sur le monde arabe au début du XXe siècle. Le premier ministre David Lloyd George a expliqué en quoi le sionisme était un instrument du renforcement des intérêts britanniques. George avait compris que l’avenir de l’empire britannique en tant que puissance maritime dépendait en partie de la création d’un ة tat tampon en Palestine… Les intérêts britanniques consistaient alors tout particulièrement dans la protection des chemins de fer et du pipeline pétrolier depuis Kirkuk, en Irak, jusqu'au port palestinien de Haïfa. Dans la géopolitique actuelle, cela est encore plus vrai.
Lorsque les ة tats-Unis ont réalisé qu’Israël pouvait permettre de protéger l’approvisionnement pétrolier de l’Occident, ils ont octroyé à Israël une aide économique et militaire plus importante qu’à n’importe quel autre pays. C’est ce rôle d’Israël comme atout stratégique pour les intérêts occidentaux dans la région qui alimente la colère du monde musulman. Le fait qu’Israël soit le seul ة tat dans le Moyen-Orient auquel les Occidentaux ont permis de se doter d’un arsenal nucléaire est perçu comme typique de la politique de « deux poids et deux mesures » pratiquée par l’Occident. Tant pis pour le mythe du pauvre petit Israël incarnant David qui se bat contre le Goliath arabe.
Un autre mythe est très répandu : celui selon lequel l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) et les ة tats arabes n’ont jamais accepté les droits d’Israël à exister. Or, le Conseil national palestinien a accepté, en 1988, la coexistence de deux ة tats fondés sur la résolution 181 de l’Onu de 1947 concernant la partition de la Palestine. Ce ne sont pas les Arabes qui ont perpétré des attaques pour détruire Israël, mais Israël qui depuis 1948 a lancé des guerres dans la région. Cela est largement prouvé et documenté par des historiens israéliens accusés de révisionnisme dans leur pays : Ilan Pappe et Benny Morris. Ce dernier, qui demeure un ardent défenseur de la politique sécuritaire d’Israël, a vigoureusement démantelé ce mythe.
Ces historiens ont aussi dénoncé le mythe du jeune ة tat d’Israël se battant en 1948 contre des hordes innombrables d’armées arabes. Lorsque la Ligue arabe lança un appel aux pays arabes pour envoyer des troupes en Palestine, seulement cinq ة tats répondirent. Leur mission était de sécuriser les parties de la Palestine qui avaient été cédées aux Arabes dans le cadre du plan de partage onusien. Ces armées régulières étaient en outre mal équipées et dépourvues d’un commandement unifié pouvant coordonner leurs actions, et elles étaient moins nombreuses que les militaires israéliens. Les recherches de Morris montrent aussi que les forces d’Israël perpétrèrent des massacres pour susciter la panique au sein de la communauté palestinienne. Ceux qui ne fuirent pas, terrorisés, furent chargés dans des camions ou contraints de s’exiler à pied, sous escorte armée. Leurs propriétés et habitations furent aussitôt confisquées.
ہ l’exception de la guerre de Yom Kippour, en 1973, lorsque l’ ة gypte put récupérer sa terre occupée en 1967 par Israël, chaque épisode du conflit s’est soldé par l’annexion par l’ ة tat juif de nouveaux territoires. Malgré cela, la Ligue arabe a fait sienne la totalité des propositions de l’Arabie Saoudite pour la normalisation des relations diplomatiques et commerciales avec l’ ة tat d’Israël. Des propositions que Israël a complètement ignorées – ce qui peut paraître surprenant étant donné l’affirmation par Israël que son seul souhait est de voir son droit à l’existence reconnu.
Cela illustre clairement que l’objectif d’Israël comme entité sioniste était, depuis le premier jour, la création d’un ة tat expansionniste aux dépens de la coexistence pacifique avec les Palestiniens et les autres voisins.
Aujourd’hui, le soi-disant « mur de sécurité » n’est qu’une manœuvre dans le but d’annexer d’autres parties de la Cisjordanie. Cela se soldera par une réduction de la surface de la Cisjordanie et de Gaza qui ne constitueront pas plus que 10 % de la Palestine originelle. Une situation qui ne peut être considérée comme une base acceptable pour la création de deux ة tats.
Pour comprendre les enjeux actuels, il est donc nécessaire que l’on se débarrasse de la mythologie basée sur la propagande, la distorsion et la falsification. Ceux qui s’intéressent à ce débat devraient lire Les Mythes du sionisme, de l’universitaire britannique John Rose (Pluto Press, 2004, Grande-Bretagne). […] Rose est particulièrement impressionné par les longues phases de coexistence entre Arabes et Juifs et croit que la solution pour l’avenir doit être fondée sur cette redécouverte existentielle. Il croit que seul un ة tat unique pourra constituer une solution viable et durable. L’exemple de l’Afrique du Sud, établi sur la Charte des libertés [où toutes les communautés cohabitent, ndlr], peut contribuer à un tel débat, surtout si l’on songe à l’impasse où se trouvent, du fait d’Israël, l’option des deux ة tats et la feuille de route qui avaient pourtant reçu l’appui de la communauté internationale.
Alors qu’il est nécessaire de reconnaître que l’histoire du peuple juif a connu des périodes d’indicibles souffrances et discriminations, il est dans son intérêt, où qu’il se trouve, de comprendre les dommages que cause le sionisme aux valeurs du judaïsme. […] Dénoncer la mythologie sioniste ne veut pas dire abandonner ou s’en prendre au peuple juif, mais l’aider à résoudre un conflit dans l’intérêt de tous les Israéliens et Palestiniens, qu’ils soient juifs ou arabes. »
Ronnie Kasrl -Auteur d’une autobiographie, Armed and Dangerous ; My Undercover Struggle Against Apartheid, publiée en 1993 chez Heinemann, Londres
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