Le Gran Soir, 21 juillet 2012



Syrie: à ceux qui jouent des tambours de la guerre !
Bachar al-Jaafari

Comme attendu, hier 19 Juillet, la Russie et la Chine ont prononcé leur troisième double veto et déjoué, une fois de plus, le sempiternel projet conçu par « les ennemis de la Syrie » pour pousser le Conseil de sécurité à adopter une résolution totalement injuste lui infligeant encore plus de sanctions illégitimes en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, tandis que le Pakistan et l’Afrique du Sud se sont abstenus. Suite au vote, le délégué syrien permanent auprès des Nations Unies, le Docteur Bachar al-Jaafari, a pris la parole ; parole qui n’est sans doute pas parvenue aux syriens de l’extérieur et à ceux qui auraient pu être intéressés de l’écouter, étant donné le silence strident imposé aux médias syriens avec la complicité d’Arabsat, de Nilesat et de toutes sortes de censures concoctées par des pays arabes et occidentaux qui s’évertueraient à instaurer des libertés, notamment la liberté d’expression ! En voici une transcription non intégrale à partir d’une vidéo récupérée ce matin sur you tube


 





Monsieur le Président… Le peuple syrien est désormais saisi d’angoisse et d’inquiétude avant chaque réunion du Conseil de sécurité autour de la Syrie, et ceci principalement en raison de ce sur quoi nous avions attiré votre attention depuis le début : la synchronisation suspecte entre ces séances du Conseil et les opérations terroristes cruelles qui ont touché un grand nombre de personnes innocentes parmi le peuple syrien ainsi que bon nombre de ses institutions, de ses cadres, de ses biens publics et privés !


Messieurs…vous vous rappelez certainement de toutes les explosions et massacres qui ont terrorisé les habitants de plusieurs régions syriennes… pendant que le Conseil de sécurité discutait de la Syrie… C’est avec regret que nous vous rappelons qu’hier encore, le bras du terrorisme meurtrier s’en est pris à des ministres et à des dirigeants des organes de la Sécurité nationale réunis à Damas… C’est aussi avec regret que nous constatons que ce Conseil n’a nullement condamné cet acte… mais… nous adressons nos remerciements à Mr le Secrétaire général et à l’émissaire spécial Mr Kofi Annan pour leurs condamnations respectives.


Monsieur le Président… Si un tel acte terroriste est incapable de susciter une condamnation sévère et immédiate de la part de ce Conseil… cela signifie assurément que tout ce que la communauté internationale a édifié pour lutter contre le terrorisme n’était que lettre morte… C’est là un échec qui adressera un message d’erreur aux terroristes du monde entier leur disant qu’ils sont au-delà de tout questionnement… C’est là un silence qui signifiera que soutenir une solution pacifique et éloignée de toute violence en Syrie n’est pour certains qu’un simple slogan destiné à gagner du temps, à duper l’opinion publique syrienne et internationale, et à bloquer le plan de Mr Kofi Annan ; alors que la Syrie a accueilli favorablement son plan en 6 points, la mission des observateurs internationaux et les déclarations de la Conférence de Genève du 30 juin 2012 […].


Mais… malheureusement des pays étrangers se sont mêlés immédiatement et brutalement d’une affaire strictement syrienne pour sonner les tambours de la guerre et devenir une partie du problème en fournissant armes, finances, couverture politique, couverture médiatique, et appui logistique aux gangs armés ; en plus d’inciter à la violence et au refus du dialogue et d’adopter un paquet d’une soixantaine de sanctions illégales qui ont perturbé la vie quotidienne du peuple syrien… Sanctions qui bafouent les règles de bon voisinage ainsi que toutes les normes et les lois internationales les rendant juridiquement criminelles… Ceci, sans oublier les ruptures des relations diplomatiques avec la Syrie pour couper court à tout dialogue et à tout contact direct.


Au nom du peuple syrien, nous disons à tous ces pays : si vous voulez imposer la loi de la jungle à d’autres et que cette décision vous semble logique, commencez donc par l’appliquer à vos pays respectifs et demandez à ceux parmi vos ressortissants et résidents, qui sympathisent sincèrement ou non avec les bandes armées et les terroristes qui sévissent en Syrie, de les accueillir et de leur offrir la liberté qu’ils convoitent et particulièrement celle de semer le désordre par les armes … tout comme la liberté de déstabiliser et de détruire le tissu national et les fondements de l’État syrien, sous prétexte d’instaurer réformes et démocratie !


Monsieur le Président… Les rumeurs qui ont envahi dernièrement les médias à propos d’« armes chimiques » que la Syrie pourrait utiliser, ne sont que des rumeurs dénuées de tout fondement… ne sont qu’une pêche en eaux troubles… Si jamais elles pouvaient fournir une quelconque preuve, elles indiqueraient plutôt l’intention de certains de s’en servir contre les Syriens, pour en accuser ensuite les autorités syriennes et retourner l’opinion publique et le Conseil de sécurité contre ces mêmes autorités.


Tous les Syriens veulent contribuer, sur les bases de la réconciliation et du pardon réciproque, à travailler ensemble pour reconstruire ce qui a été détruit au cours de cette crise, à aller de l’avant pour faire évoluer et consolider un État de Droit, à ramener le calme et la stabilité en lieu et place de ceux qui souhaitent l’adoption d’une résolution du Chapitre VII ou d’une intervention militaire étrangère ; ce qui permettrait à certains États de faire l’économie de leur autocritique et d’effacer de la mémoire de ce conseil toutes les catastrophes et horreurs qu’ils ont laissées après leur passage !


Par conséquent c’est à nous les Syriens, opposants compris, de réaliser que nombre d’États qui se prétendent vivement concernés par la Syrie et son peuple ne veulent pas d’une solution pacifique qui garantirait l’unité, la stabilité et la souveraineté du pays et qui permettrait de répondre aux aspirations de notre peuple. Bien au contraire, ceux-là ne visent que l’État et le peuple syriens ainsi que leur rôle au niveau arabe, musulman et régional ; ceci en jouant sur les désaccords politiques survenus sur le terrain durant cette crise… et pire encore… en jouant sur des éléments qui pensent que ceux qui ont trahi les Arabes par les « Accords de Sykes- Picot » et la « Promesse de lord Balfour »… ont assassiné le premier ministre syrien de la Défense, le Général Youssef al-Azmeh, à la bataille de Mayssaloun… ont bombardé le parlement syrien en 1945… ont infligé une blessure encore ouverte en Palestine… ont envahi militairement L’Afghanistan, l’Irak et la Lybie… ont accordé leur soutien politique, militaire, et diplomatique à Israël pour lui assurer le Golan syrien, les territoires palestiniens et ce qui reste de territoires libanais non libérés… leur rendraient le moindre des services pour garantir autre chose que leurs propres intérêts !


C’est à nous les Syriens de ne reconnaître qu’une seule vérité, celle qui consiste à penser que l’unique solution, qui puisse répondre aux aspirations légitimes de notre peuple, ne peut-être qu’une solution politique syrienne qui dépend de nous tous… et qui passe par le dialogue national entre nous et sous le ciel de notre patrie… entre nous tous et sous le ciel de notre patrie ! C’est à nous tous d’arriver à bâtir un État démocratique, pluraliste et équitable où tous sont égaux devant la Loi sans discrimination en fonction de l’appartenance familiale, politique ou idéologique… Un état qui offrirait à tous les mêmes chances politiques et économiques et où la compétition passerait par des élections libres et transparentes, comme cela se passe dans vos pays respectifs…


Seuls les Syriens sont capables de protéger leur pays et de maintenir son immunité contre les ambitions géopolitiques qui menacent son existence et sa dignité… Alors, pansons nos blessures mutuelles, n’oublions pas notre Histoire commune et restons tous conscients de tout ce qui se tisse contre notre peuple, pour nous garder une patrie résistante face à tout ennemi.


Monsieur le Président… je conclurai par une citation d’un philosophe syrien soufi qui a vécu à Damas au Xème siècle après J.-C. Il s’agit d’un conseil prodigué à ses élèves : « Mes enfants, l’homme raisonnable ne doit jamais manquer de discernement lorsqu’il contribue à écrire l’Histoire, et même celui qui aurait un problème avec le Diable ne peut en chercher la solution auprès de Lucifer ! ».


Merci Messieurs.


Article transcrit et traduit de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal [Biologiste]

 

Add comment


Security code
Refresh

accueil
Dichiarazione per la Privacy - Condizioni d'Uso - P.I. 95086110632 - Copyright (c) 2000-2024