Le saker francophone, 20 septembre 2016
 
Le Quai d’Orsay, l’UE et les USA financent le «Aleppo Media Centre», qui défend la cause des djihadistes
Vanessa Beeley
 
 
L’histoire a fait la une partout : «Petit garçon sorti vivant des décombres». La vidéo et la photographie produites par le Aleppo Media Centre (AMC), qui montrait Omran Daqneesh, alias «le petit rescapé d’Alep» prétendument sauvé par les notoirement connus casques blancs dans la partie est d’Alep tenue par les terroristes, est aussitôt devenue virale et a été propulsée bien haut dans la stratosphère de la propagande médiatique occidentale
 
Le petit Omran
 
Pratiquement tous les grands organes de presse du monde entier ont montré la vidéo et ce qui est devenu depuis la célèbre photographie d’Omran, le «petit rescapé d’Alep». Le garçon couvert de poussière et de sang a été placé sur une chaise dans ce qui semble être une ambulance en parfait état, malgré sa présence dans une prétendue zone de guerre, pour ensuite être photographié en rafale par un nombre incalculable de caméras et de téléphones portables. Pendant tout ce temps, personne ne lui a prodigué des soins, comme s’il s’agissait d’une séance photo montée de toutes pièces.
 
Personne ne l’a réconforté, n’a pansé ses prétendues plaies, ne lui a posé un collier cervical ou ne l’a placé dans une civière au cas où il aurait subi des lésions cervicales (procédure de premiers soins habituelle), lui qui venait d’être sauvé de «sous les décombres» d’un immeuble bombardé qui, selon l’AMC, était visé par des «frappes aériennes russes et syriennes».
 
Le Aleppo Media Centre a vraiment réussi un beau coup de propagande, qui a suscité bien des appels en faveur d’une zone d’exclusion aérienne et d’une intervention occidentale, donnant ainsi un nouveau souffle à la feuille de route fripée des États-Unis préconisant un « changement de régime » en Syrie. Cependant, un certain nombre de journalistes indépendants internationaux, d’analystes des médias et de militants pour la paix ont commencé à avoir des doutes sur l’image et sa source, en révélant des détails extrêmement troublants non seulement à propos de la photo, mais surtout au sujet de l’organisation qui l’a fournie aux médias occidentaux avides de sensationnalisme.
 
«Récemment, la photo poignante d’un enfant syrien ensanglanté et apparemment en état de choc, assis dans une ambulance à Alep, a été largement diffusée et commentée dans les médias nationaux et internationaux. En réponse, des journalistes ont appelé l’administration Obama à prendre des mesures, y compris le bombardement de cibles militaires du gouvernement syrien.» – Déclaration du groupe Veterans for Peace
 
Une analyse rétrospective de cette histoire montre que toute cette fureur médiatique pilotée par Washington, Londres, l’Europe, les pays du Golfe, la Turquie et Israël a été délibérément montée en épingle. En plus de servir de catalyseur aux réactions concertées des gouvernements néocolonialistes, elle est parvenue aussi à ériger un écran de fumée pour mieux dissimuler les massacres quotidiens commis par les terroristes soutenus par les États-Unis, l’OTAN et les pays du Golfe, ces soi‑disant «rebelles modérés» à l’est d’Alep (où il reste environ 220 000 personnes, dont de nombreux terroristes et membres de leurs familles), contre des civils syriens comptant parmi les 1,5 million d’habitants à l’ouest d’Alep, un secteur sous le contrôle et la protection du gouvernement syrien et des forces armées nationales syriennes.
 
Dans les deux premières semaines d’août seulement, 143 civils ont été tués par des tirs de mortier du Front aI-Nosra visant l’ouest d’Alep, dont 54 enfants et 23 femmes. Cette information a été fournie à Vanessa Beeley par le Dr Zahar Buttal, directeur de la Aleppo Medical Association lorsqu’elle s’est rendue à l’ouest d’Alep le 14 août 2016.
 
Les suspects habituels
 
Si la BBC, CNN, le New York Times, le Washington Post, Al Jazeera et consorts avaient fait une recherche rapide sur Internet, ils seraient vite tombés sur ce que des médias plus consciencieux ont découvert.
 
Le prétendu photographe d’Omran, le «petit rescapé d’Alep», s’appelle Mahmoud Raslan [ou Rslan], qui se décrit comme un «photo-journaliste militant». L’examen de son propre profil et de ses photos sur les médias sociaux a révélé que Raslan est un sympathisant terroriste à part entière, ce qu’ont très rapidement rapporté un certain nombre de médias respectables et fiables dont Telesur et Sputnik News :
 
«Des photos circulant en ligne tirées du compte du photographe d’Omran sur les médias sociaux, un homme du nom de Mahmoud Raslan, le montrerait en train de sympathiser avec les tueurs d’un autre enfant, un gamin de 12 ans appelé Abdullah Tayseer Issa, qui a été décapité de façon grotesque par des rebelles modérés soutenus par les USA le mois dernier […]. Les photos circulant sur les médias sociaux, qui ont été recueillies par LiveLeak (avertissement, images choquantes), montrent des captures d’écran de la page Facebook de Raslan, dont une photo qui le montre posant et souriant avec les mêmes terroristes du mouvement Nour al-Din al-Zenki qui ont tué Issa de sang-froid.»
 
Raslan a su tirer parti de sa nouvelle gloire médiatique en livrant un témoignage poignant, en commençant par The Telegraph qui a repris son histoire en omettant, semble-t-il, de se pencher sur ses racines terroristes :
 
«Mes larmes ont commencé à couler quand j’ai pris la photo. Ce n’est pas la première fois que je pleurais. J’ai pleuré bien souvent en filmant des enfants traumatisés. Je pleure toujours. Nous, les photographes de guerre, pleurons tout le temps.»
 
Apparemment, les mauvais traitements, la torture et la décapitation d’Abdullah Issa, un gamin de 12 ans (par les tueurs d’enfants posant avec lui sur la photo ci‑dessous), n’ont pas réussi à faire couler les mêmes larmes de crocodile des yeux de Raslan, le sympathisant terroriste.
 
Au cours de ses diverses incursions dans l’univers trouble des médias oiseaux moqueurs sous le contrôle de l’État profond, Raslan a toujours soutenu être un «pigiste» travaillant en dilettante auprès d’Al Jazeera et de l’AFP «affilié» au Aleppo Media Centre.
 
Sarah Flounders, la directrice du International Action Centre, a affirmé ceci à RT :
 
«Non, je crois que ce photographe est bien connu sur Facebook et YouTube, où il publie continuellement des images, des photos faisant l’éloge de la milice Zinki, qui était en fait une organisation terroriste bien connue avant même cette décapitation horrible d’un enfant palestino-syrien. Il est bien loin d’être un militant des droits de la personne. Il se décrit comme un militant des médias, mais son rôle consiste à applaudir et à soutenir les activités terroristes en Syrie.»
 
Entre autres déclarations, Raslan a écrit sur sa page Facebook que «certains des meilleurs moments que j’ai passés, c’est avec des kamikazes».
 
Dans une interview accordée plus tard à Al Babwa, Raslan fait de son mieux pour réparer les dommages causés à sa réputation :
 
«Je ne travaillerais jamais avec un groupe qui s’inscrit en faux contre mes croyances personnelles, mais il faut parfois se faire prendre en photo avec eux.» Il poursuit : «Je prends habituellement des centaines de selfies avec tous ceux que je rencontre sur le front. Nous qui travaillons dans les médias prenons des centaines de photos que nous gardons dans nos archives.»
 
Ces propos nous amènent à déduire que la prochaine fois que Raslan sera «au front», ses pages Facebook et Twitter seront inondées de selfies le montrant avec des partisans de Daesh, du Front al-Nosra (al-Qaïda), d’Arar al-Sham, de Nour al-Din al-Zenki et de quiconque s’y trouvera.
 
Suivons la trace de l’argent : qui finance le Aleppo Media Centre ?
 
Lorsqu’on suit la trace de l’argent, les choses deviennent plus intéressantes encore. Anne Barnard du New York Times a rédigé un compte rendu émouvant de l’histoire d’Omran. Rappelons qu’elle a aussi rendu un bel hommage à un kamikaze il n’y a pas si longtemps. Dans son reportage, elle décrit le Aleppo Media Centre comme suit :
 
«Un groupe constitué de longue date qui réunit des militants et des citoyens journalistes, hostiles au gouvernement, qui rendent compte du conflit (…).»
 
Lorsqu’on suit cette guerre sale en Syrie avec un esprit critique, les termes «militants» et «citoyens journalistes» dans la même phrase ont de quoi rendre perplexe. En ajoutant qu’ils sont «hostiles au gouvernement», elle brosse ainsi un beau tableau de propagande.
 
Ce que Anne Barnard du NYT ne dit pas à ses lecteurs, c’est que cette terminologie [employée par les médias assurant les relations publiques de l’OTAN] laisse planer une préférence pour les barbus wahhabites, qui scandent la formule du takbir [Dieu est grand] en faisant déferler une pluie de missiles sur des civils, ainsi qu’une adhésion à un processus de sélection des «rebelles modérés» qui veille à ce que ceux qui n’adhèrent pas à leur idéologie extrémiste soient déclarés infidèles et sommairement exécutés.
 
La trace de l’argent
 
Commençons par examiner les sources de financement de ce groupe de citoyens journalistes militants intégrés à la ribambelle de groupes terroristes extrémistes religieux et à d’autres au service des États-Unis et de l’OTAN, localisés exclusivement dans les secteurs à l’est d’Alep dominés par le Front al-Nosra, d’où sont lancés quotidiennement les canons de l’enfer qui brisent les vies des 1,5 million de Syriens demeurant à l’ouest d’Alep, sous le contrôle de l’armée syrienne.
 
Comme l’a souligné à juste titre le site Sott.net, le Aleppo Media Centre est un «projet» de la Syrian Expatriates Organization [SEO] :
 
«La SEO est exactement ce que son nom laisse entendre, c’est-à-dire un groupe de citoyens américains d’origine syrienne qui a ses bureaux sur K Street à Washington D.C., une rue reconnue pour être le cœur de l’industrie du lobbying politique aux USA, où se trouvent une multitude d’organes de réflexion, de lobbyistes et de groupes de défense.»~ Sott.net
 
Le site Web de la SEO nous apprend qu’elle a joué un rôle déterminant dans la création du Aleppo Media Centre :
 
«Les reportages de nouvelles et la sensibilisation des médias sont des tâches jugées cruciales au soulèvement civil en Syrie. Le Aleppo Media Centre, un centre de nouvelles spécialisé qui dessert Alep et ses banlieues, a été mis sur pied grâce à une généreuse contribution de la SEO. Depuis octobre 2012, la SEO est responsable d’assurer la coordination du Aleppo Media Centre et de lui procurer une aide technique et logistique, en plus de l’aide financière qu’elle lui a fourni.»  
 
Cependant, la SEO n’est pas l’unique mécène de ce centre des médias fréquemment cité, bien ancré dans le territoire du Front al-Nosra. En décembre 2015, Canal France International (CFI), un organisme de l’État français, était tout heureux d’annoncer que la radio du Aleppo Media Centre allait commencer à émettre sur les ondes FM dans les villes d’Alep, d’Idlib et d’Hama. Idlib et Hama, ainsi que l’est d’Alep, sont tous des bastions du Front al-Nosra.
 
L’annonce du lancement de la radio du AMC se trouve sur le site Web de CFI :
 
«Le Aleppo Media Centre, qui rassemble de manière permanente une vingtaine de journalistes basés en Syrie, produit et diffuse depuis 2012 une information continue sur l’actualité de la région, publiant des articles, des photos et des vidéos sur son site Internet et les réseaux sociaux.
 
Grâce au soutien de l’incubateur des médias syriens de Gaziantep (Turquie), ce centre voit désormais se concrétiser un nouveau projet : créer une radio locale à Alep, qui sera diffusée deux heures par jour sur la fréquence FM 99.00 et environ 15 heures par jour sur Internet.
 
En 2015, l’Incubateur a proposé aux journalistes du Aleppo Media Center plusieurs formations dans le domaine de la radio et de la vidéo. En novembre, il a soutenu l’achat d’équipements pour le studio, l’installation du studio, et formé l’équipe à son utilisation.
 
En décembre, deux membres du centre ont aussi bénéficié d’une formation de formateur qui leur permettra de former à leur tour des citoyens journalistes à l’intérieur même de la Syrie.»
 
Le Aleppo Media Centre reçoit donc aussi le «soutien» d’une organisation appelée l’incubateur des médias syriens basée à Ganziatep, en Turquie. Le choix du nom est intéressant, puisque la Turquie aussi a servi d’incubateur aux mercenaires terroristes de tout acabit soutenus par les États-Unis et l’OTAN, les pays du Golfe et Israël qui ont envahi la Syrie par la frontière turque avec leurs armes et leur équipement. C’est d’ailleurs la principale cause du prolongement du conflit syrien en cours, qui a engendré ce cycle perpétuel de misère et de carnage que subit le peuple syrien.
 
C’est ici que les choses deviennent plus croustillantes. «L’incubateur des médias syriens» est un projet financé par Canal France International (CFI), l’agence de coopération et opérateur du ministère des Affaires étrangères de la France dans le domaine des médias. Oui, c’est bien le Quai d’Orsay qui finance le Aleppo Media Centre, la principale source d’«informations» sur Alep larguées à l’ensemble des médias de masse au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Europe.
 
C’est écrit en bleu, blanc et rouge sur le site Web du gouvernement  français :
 
«Canal France International (CFI), agence française de coopération, opérateur du ministère français des Affaires étrangères dans le domaine des médias, vient de signer deux contrats importants (2,7M€) avec l’Union européenne pour développer des projets en faveur des médias indépendants du monde arabe.
 
Le premier contrat de deux ans concerne un projet d’accompagnement du développement de médias syriens, principalement par le biais de formations.
 
D’un montant de 1,5 million d’euros, il est financé à hauteur de 1,2 million par l’Union européenne. L’objectif principal du projet est de préparer une nouvelle génération de journalistes syriens capables, aujourd’hui, de produire une information de qualité et professionnelle, et demain de constituer les piliers des médias de l’après-crise.
 
Dès le mois d’avril 2014, CFI ouvrira les portes d’un centre de médias, baptisé «Syrian Media Incubator», dans la ville turque de Gaziantep, à 60 km de la frontière syrienne, au nord d’Alep. Cet espace de travail collectif vise à fournir des outils modernes de télécommunication et à accompagner les journalistes syriens décidés à continuer, coûte que coûte, de relayer l’information de leur pays.»
 
Cet aveu du gouvernement français n’est rien de moins que spectaculaire. Examinons de près cette annonce : la France et l’UE, qui sont loin d’être des observateurs impartiaux de la guerre que livrent en Syrie les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN, les pays du Golfe et Israël, financent et soutiennent un organe de presse qui attise le feu de la propagande à des points stratégiques dans la bataille que livre l’Armée arabe syrienne pour libérer Alep des griffes des gangs terroristes de la coalition des États-Unis. Le feu qu’il attise permet de détourner le regard du public des véritables atrocités commises par les entités terroristes contre des civils syriens à Alep et de relancer les appels en faveur d’une zone d’exclusion aérienne, l’outil ultime que veut se procurer l’OTAN pour réduire la Syrie à un État en déliquescence comme la Libye.
 
Il convient de noter aussi que l’UE est aussi l’une des principales sources de financement de cette autre ONG de «l’opposition syrienne» qu’est l’Observatoire syrien des droits de l’homme (SOHR), un one-man show basé en Grande-Bretagne donné par un ancien condamné syrien appelé Rami Abdelrahman (dont le véritable nom est Osama Ali Suleiman ; photo, à gauche). Celui-ci travaille en coordination avec le ministère britannique des affaires étrangères et du Commonwealth. Il est important d’en parler parce qu’à l’instar du Aleppo Media Centre, l’Observatoire est la source d’où l’ensemble des médias institutionnels occidentaux, ainsi que le département d’État des États-Unis et leurs alliés, puisent toutes leurs «nouvelles» et leurs «données» à propos de ce qui se passe prétendûment en Syrie.
 
Qu’il s’agisse de l’histoire d’Omran ou des récentes allégations d’attaque au chlore par l’armée syrienne, toutes ces nouvelles font partie d’un programme qui a peu à voir avec le bien-être de la Syrie et relève bien plus de la volonté d’atteindre l’objectif politique de changement de régime déclaré des États-Unis et de l’OTAN, qui était en tête de liste des choses à faire en Syrie bien avant 2011 (lorsque la guerre sale planifiée en cours en Syrie a vraiment commencé à prendre de l’ampleur) par les agences de Washington responsables de l’édification [destruction] de la nation.
 
Là encore, nous voyons les mêmes «citoyens journalistes» autoproclamés bien enracinés dans les colonies terroristes nouvellement établies, ces enclaves terroristes qui regorgent de criminels fanatiques sous l’effet de la drogue, instables et violents, qui n’hésitent pas à lancer aveuglément sur les zones résidentielles densément peuplées de l’ouest d’Alep des contenants emplis de verre, d’éclats, de chlore ou d’explosif.
 
Ces «citoyens journalistes» apprécient leurs rôles et leur cantonnement en territoire terroriste et ne craignent aucunement les meurtriers qui n’éprouvent aucun scrupule à commettre les pires atrocités, y compris la décapitation d’un gamin de 12 ans émacié et fiévreux, Abdullah Issa, dont il a été question précédemment.
 
Nous assistons à la création d’une autre composante de l’État de l’ombre de l’Occident, qui se cache derrière toute une série de projets des ONG qu’il finance, et qui s’échafaude dans le brouillard de la guerre, brique après brique, jusqu’à ce que se dresse une barrière infranchissable entre le grand public et la vérité sur ce à quoi la Syrie et le peuple syrien sont réellement confrontés.
 
Cette enclave de médias de l’ombre s’installe dans la caisse de résonance de la propagande érigée par les États-Unis et l’OTAN, qui réduit au silence les appels provenant de la Syrie qu’on entendrait normalement, au profit d’une image faussée et artificielle et de reportages tordus qui utilisent sans ambages les termes «rebelles» et «combattants de la liberté» pour décrire des terroristes islamistes.
 
L’appel authentique est celui de la majorité de ce qui forme le peuple syrien, et non pas les cris de guerre de «l’opposition» choisie par les États-Unis et l’OTAN, dont la plupart des partisans ne vivent même pas en Syrie.
 
La méthode
 
«Pour mémoire, en partenariat avec International Media Support (IMS) et Reporters sans frontières (RSF), CFI a notamment contribué en 2013 à la création de la radio syrienne indépendante Radio Rozana qui émet depuis Paris et s’appuie sur un réseau de 30 correspondants basés en Syrie. Ces derniers ont bénéficié en 2013 de plusieurs formations organisées par CFI.»
 
Les pays visés
 
«Le second contrat signé avec l’Union européenne, d’une durée de trois ans, permettra à CFI de financer des projets visant à développer l’information en ligne en Algérie, au Maroc, en Tunisie, en Libye, en Égypte, en Jordanie, en Palestine, au Liban et en Syrie.»
 
Leur objectif clair et la fin en soi
 
«Dans un paysage arabe en pleine mutation, CFI renforce ainsi ses efforts pour accompagner les médias indépendants appelés à jouer un rôle majeur dans les fragiles processus de démocratisation en cours.»
 
L’aval du gouvernement français
 
«Le ministère des Affaires étrangères et du Développement international (MAEDI) confie à CFI la mission de mettre en œuvre sa politique d’appui au développement des médias publics et privés, et plus généralement du secteur audiovisuel dans une perspective tri‑media, dans les pays bénéficiaires de l’aide publique au développement.
 
Ses objectifs demeurent la diffusion de l’information [propagande], la consolidation de la société civile et de l’État de droit et l’appui aux nouvelles démocraties ou “États fragiles”. Son endossement à France Télévisions et Arte France est le garant de son professionnalisme.»
 
Des organes de presse comme le Aleppo Media Centre sont décrits dans une étude de CFI, «en opposition à la propagande de Damas». Pourtant, lorsqu’on sait que la soi‑disant propagande de Damas est aussitôt rejetée de tous les côtés par les gouvernements de la coalition menée par les États-Unis, leurs médias d’État, les groupes de défense des droits de la personne, les groupes d’opposition contrôlés, toutes les ONG antisyriennes financées par Soros, les chouchous de l’OTAN que sont  les casques blancs et, enfin, les groupes de réflexion alignés sur l’OTAN, il est difficile de comprendre cet appel à une opposition en présence d’un si puissant lobby international opposé à l’État syrien.
 
L’aval des Israéliens
 
Rappelons qu’Israël, qui est le principal bénéficiaire de la guerre menée par la coalition des États-Unis en Syrie selon Bouthaina Shaaban (conseillère politique et médiatique du président syrien Bachar Al Assad), tenait une page consacrée aux reportages du Aleppo Media Centre sur le site Web du Times of Israel jusqu’en mars 2015. Cet honneur n’est réservé qu’à ceux qui s’inscrivent dans le cadre très étroit de la vision géopolitique sioniste préconisant la fragmentation du Moyen‑Orient et le déchirement de la Syrie, son rival de toujours, le long de lignes de fracture sectaires, une politique menée par Israël et par son complice de crime, plus exposé que jamais, qu’est l’Arabie saoudite.
 
Les principaux acteurs
 
Un des cofondateurs du Aleppo Media Centre est Zein Al Rifai, l’autre étant Youcef Seddik. Dans une interview accordée au  Syria Deeply, une autre étoile de la constellation des centres des médias nouvellement constitués pour diffuser de la propagande contre l’État syrien et son armée nationale, Al Rifai répond aux questions en proférant les mêmes clichés et mensonges éhontés.
 
«Alep a été l’une des premières villes à protester. Les manifestations qui ont eu lieu à l’Université d’Alep étaient importantes, mais malheureusement, les médias ne parlaient pas d’Alep à cette époque et les premières manifestations ne sont pas bien documentées, explique Al Rifai.»
 
Se pourrait-il que ces «premières manifestations» n’aient pas été bien documentées parce qu’elles n’ont pas eu lieu, contrairement à ce qu’affirme Zein Al Rifai, fondateur du Aleppo Media Centre ?
 
NOTA – Syria Deeply est financé par la Asfari Foundation, dirigée par son PDG Ayman Asfari, qui a aussi attribué un financement de démarrage de 300 000 dollars pour la campagne syrienne, dont l’équipe est à l’origine du plus grand succès de l’intervention d’agents de l’OTAN sur le terrain : les Casques blancs.
 
Voici la réponse du Dr Tony Sayegh, un éminent chirurgien basé à l’ouest d’Alep, lorsqu’on lui a demandé comment c’était à Alep avant le conflit :
 
«C’est en juillet 2012 que tout a changé. Mais ce ne sont pas les résidents d’Alep qui se sont rebellés contre les dirigeants. Des parties de la ville ont été envahies par des groupes armés provenant d’ailleurs en Syrie et d’autres pays.» Tony Sayegh croit que les intérêts en cause dans cette invasion dépassaient largement le contrôle d’une seule ville.
 
«La tentative de renverser le gouvernement de la Syrie par les armes et les émeutes avait échoué. Ils ont alors décidé de se concentrer sur Alep, pour faire buter toute l’économie syrienne. Les groupes armés ont pris les services d’eau et les centrales électriques afin de stopper l’approvisionnement des résidents, puis ont jeté leur dévolu sur les industries. Des usines au complet ont été démantelées et transportées en Turquie. Ils ont tout volé. C’est à ce moment que tout a chamboulé et que le malheur d’Alep a commencé.»
 
Une recherche sur les activités d’Al Rifai et de Seddik révèle que ces deux «citoyens journalistes» opposés au gouvernement syrien n’ont aucune difficulté à entrer en France pour y faire des tournées promotionnelles, ce qui est quand même extraordinaire quand on sait qu’il est pratiquement impossible pour la majorité des citoyens syriens laïcs favorables au gouvernement [ou simplement opposés à l’intervention de l’OTAN] d’obtenir un visa, en raison des dures sanctions que les États-Unis et l’UE imposent contre l’État syrien, qui affectent avant tout le peuple syrien.
 
En outre, les deux hommes sont immanquablement décrits par la presse française comme des «opposants à Bachar el-Assad» et des «journalistes» qui n’ont pas d’objection à maintenir des relations avec des entités terroristes comme le Front al-Nosra (Al-Qaida en Syrie), puisqu’ils partagent le même but, qui est de renverser le président Assad.
 
«Nous maintenons de bonnes relations avec la plupart des factions de l’opposition. Nous partageons tous le même objectif : libérer la Syrie de la tyrannie, sauf que chacun d’entre nous suit sa propre voie pour y parvenir. Nous avons couvert des secteurs sous le contrôle du Front al-Nosra à Alep et à Idlib. Ils nous ont toujours laissés tranquilles.» ~ Zein Al Rifai à Syria Deeply
 
En plus de manifester leur attachement à une organisation qui est responsable d’un pourcentage énorme des atrocités commises contre la majeure partie du peuple syrien et ailleurs, les deux hommes se font souvent accompagner dans leurs tournées par nulle autre qu’Hala Kodmani, la soeur de la directrice du Conseil national syrien, Basma Kodmani (photo, à gauche).
 
Les qualifications de Basma Kodmani comme candidate de l’opposition favorisée par l’OTAN, qui a participé deux fois aux réunions du Groupe Bilderberg, ont été passées au peigne fin par Charlie Skelton du quotidien The Guardian :
 
«Il en ressort que Kodmani est un fidèle lieutenant de l’industrie de la promotion de la démocratie anglo-américaine. Sa «province d’origine» (selon le site Web du Conseil national syrien) est Damas, mais son parcours professionnel est lié étroitement et depuis longtemps aux pouvoirs qu’elle supplie d’intervenir en Syrie.»
 
Conclusions
 
Une recherche très rapide à partir des termes Aleppo Media Centre + Omran fait ressortir le rôle crucial de cet organe de presse soutenu par l’Occident dans le moulin de la propagande des médias alignés à l’OTAN. Pratiquement tous les grands médias institutionnels utilisent les vidéos et les reportages du AMC pour encourager et maintenir le flot incessant de chroniques de la coalition des États-Unis anti Assad. The Guardian, Channel 4, la BBC, The Telegraph, CNN, Fox News, Time, FT et bien d’autres dépendent tous du AMC pour livrer le produit qu’ils nous concoctent à propos de la Syrie.
 
Bref, c’est le Smart Power (pouvoir de l’intelligence) en action, l’instauration d’un monde meilleur où les gros bonnets des médias, dans le confort de leurs tours de bureaux à Londres, Paris et Manhattan, n’ont plus à se salir les mains en zone de guerre, laissant le soin aux «militants» et aux «citoyens journalistes» de faire le boulot à leur place.
 
Le problème du point de vue professionnel et éthique c’est que, dans le cas du Aleppo Media Centre, ses reportages ne sont pas équilibrés ni objectifs. Le AMC est financé par le Quai d’Orsay, l’UE et les États-Unis, qui ont tous investi massivement dans l’opération militaire de la coalition menée par les États-Unis, dans la «feuille de route» pour la Syrie et dans l’hypothétique changement de régime qu’ils souhaitent ardemment.
 
Pire encore, le Aleppo Media Centre est intégré exclusivement au Front al-Nosra, à Arar al-Sham et dans les secteurs contrôlés par les terroristes. Ceux qui en font partie disent eux-mêmes qu’ils travaillent en étroite collaboration avec le Front al-Nosra, puisque tous partagent le même objectif qui est un changement de régime, peu importe le nombre de civils syriens massacrés en cours de route, ce qui ne manque pas de se produire à Alep.
 
Le AMC constitue un élément crucial d’un réseau beaucoup plus vaste et sinistre formé de partisans de la démocratisation et de prédateurs néocolonialistes. Il est aussi mis en valeur par Israël, le bénéficiaire principal d’un conflit et d’un chaos perpétuels en Syrie et dans la région.
 
Finalement, tout ce beau monde cherche à promouvoir l’idée que pour améliorer la Syrie, il faut commencer par la détruire. Sur la base de l’ensemble des renseignements pertinents disponibles, il est clair que les médias commandités par les États occidentaux sont des agences de relations publiques chargées de vendre cette idée à la population délibérément mal informée.
 
Ces mêmes médias syriens intégrés, ainsi que les médias institutionnels qu’ils alimentent, ne se gênent pas pour coller l’étiquette Hitler sur le dos du président Assad, une forme de diabolisation au rabais qu’eux et leurs équipes du Smart Power utilisent à répétition pour obtenir les changements de régime qu’ils convoitent, que ce soit en Libye (Mouammar Kadhafi), en Irak (Saddam Hussein) ou en Yougoslavie/Serbie (Slobodan Milosevic), pour citer quelques exemples.
 
Ces campagnes d’«hitlérisation» s’avèrent fructueuses, mais on ne peut s’empêcher de constater, à la lecture de la propre thèse d’Hitler à propos de la propagande, qu’il est évident que les États du Nord et la machine médiatique institutionnelle respectent rigoureusement la vue de l’esprit décrite en détail par Hitler lui-même, qui considérait la propagande comme l’élément essentiel pour contrôler les masses et garantir l’acceptation d’une guerre éternelle.
 
«L’art de la propagande consiste à être capable d’éveiller l’imagination publique en faisant appel aux sentiments des gens, en trouvant des formules psychologiquement appropriées qui attireront l’attention des masses et toucheront les cœurs.»~ Hitler, Mein Kampf
 
Vanessa Beeley est contributrice à 21WIRE, et depuis 2011, elle a passé la majeure partie de son temps au Moyen-Orient, reportant les événements qui s’y déroulent – comme chercheuse indépendante, écrivain, photographe et militante pour la paix. Elle est également membre du Comité directeur du Mouvement Solidarité Syrie, et une bénévole de la Campagne mondiale pour le retour en Palestine. Voir son travail sur son blog The Wall Will Fall.
 
Source:  21st Century Wire. Traduit par Daniel, édité par Wayan et relu par Cat pour le Saker Francophone.
 

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