Communiqué de presse

 

Des observateurs italiens participeront au procès des 7 militants saharaouis à Casablanca

 

Le 7 janvier prochain, devant le tribunal de Ais Seba’a(Casablanca), sera intenté le procès contre les 7 militants saharaouis: Brahim Dahane, Ahmed Nassiri, Ali Salem Tamek, Lachgare Degia, Yadih Ettarrouzi, Rachid Sghavar et Saleh Lebaihidi. Un groupe  d’observateurs italiens composé de juristes (les magistrats Nicola Quatrano et les avocats Francesco Marco de Martino et Luciano Capuano) et de civils, expression des associations et de la société civile (Cinzia Terzi, militante associative et don Eugenio Morlini, prêtre).

Ils y assisteront  mandatés par différentes organisations et institutions: la Municipalité de Naples, la Chambre des avocats pénalistes de Naples, l’Osservatorio Internazionale.


Ces derniers jours, une délégation d’observateurs a été reçue par le sous-secrètaire du Ministère des Affaires Etrangères, Madame Stefania Craxi.


Le procès contre les 7 militants est de délit d’opinion. Ceux-ci ne sont accusés d’aucun acte de violence mais d’attentat à la sécurité interne du Maroc, ce pour avoir fait de la propagande en faveur de l’indépendance du Sahara Occidental. Les deux premières audiences qui se sont respectivement tenues le 15 octobre et le 5 novembre dernier ont été renvoyées à cause de désordres provoqués (selon les observateurs présents) par des avocats en robe et des civils qui ont organisés une manifestation “ patriotique” contre les accusés.


Les événements de ces derniers jours, suite à la démolition du camp de Gmeil Izik de la part des forces de sécurité marocaines ont alimenté de nouvelles tensions. Dans le dernier numéro de Telquel, le directeur Ahmed Benchemsi, dans un éditorial au titre “patriotisme combustible”, manifeste la crainte que la tension existente entre la communauté marocaine et celle saharaouie puisse dégénérer en xénophobie.


Selon les observateurs, il s’agit d’une situation qui peut avoir une influence négative sur le cours du procès contre les 7 saharaouis. C’est pour cette raison que les observateurs seront présents dans la salle d’audience du tribunal et s’acquitteront de la tâche qui leur est assignée par le droit international et plus précisément par la Charte fondamentale de l’ONU.

 



A l’issue de l’audience du 17 décembre 2010, les observateurs ont diffusé le communiqué suivant :

 Le 17 décembre 2010, devant le Tribunal de première instance d’Ain Seba ‘a s’est tenu le procès des 7 militants saharaouis Brahim Dahane, Ahmed Nassiri, Ali Salem Tamek, Lachgare Degia, Yahdih Ettarrouzi, Rachid Sghavar, Saleh Lebaihidi, dont 3 sont encore détenus depuis le 8 octobre 2009. Les observateurs internationaux suivants étaient présents :


France (Aline Chanu avocat - Paris)

Italie (Maria Donatella Aschettino, Paola Russo, Nicola Quatrano – magistrats à Napoli; Bruno Larosa, Annalisa Senese – avocats à Napoli; Alessia Alvino, Roberta Galeano, Giovanna Izzo – observateurs civils à Napoli; Gilberto Mastromatteo – journaliste)

Espagne (Dolores Travieso – avocat, Luis Mangrane – avocat, Gemma Arbesu – avocat, Ravel Ruiz – avocat, Victoria Rosell – juge, Magdalena Such – avocat, José Revert – avocat, Francisco Serrano – avocat, Rosalia Perera - avocat, Antonio Mateos - procureur, Andres Marin – avocat, Juan Soroeta- avocat, Candela Carrera – avocat, Olaia Sagredo – obsarvateur civil, Itziae Iturri – observateur civil)


En outre les observateurs suédois et d’autres pays étaient aussi présents.


Le procès a été renvoyé au 7 janvier 2011. Le Tribunal a fixé une autre audience le 22 décembre prochain pour statuer sur la libération provisoire.


Au cours de cette audience, les observateurs ont pu constater :


1)           Pour les observateurs la procédure d’entrée au Tribunal et dans la salle a été particulièrement lente (longue attente, contrôle des passeports, perquisitions, prise de nom), pendant que pour le reste du public cela a été fluide. A l’entrée du Tribunal, il y avait beaucoup de personnes qui photographiaient les observateurs. A l’entrée, il a été imposé de laisser les téléphones portables, les ordinateurs, les appareils photos et même les modems des ordinateurs. Il n’a pas été demandé au reste du public de déposer les portables. Au cours de l’audience, on a pu noter des personnes, probablement de nationalité marocaine, munies d’appareils photos, qui prenaient des photos sans problèmes.


2)           La police a essayé d’empêcher l’entrée dans la salle au journaliste marocain, Chbari Abdelmoumene, membre du secrétariat de la Voie Démocratique (le parti de la gauche radicale marocaine), célèbre pour ses positions en faveur de l’autodétermination du peuple saharaoui.


3)           Il faut signaler aussi que deux observateurs (Luciano Capuano et Louis Ndong) n’ont pas pu participer à l’audience parce que le taximan s’est refusé de les accompagner au Tribunal.


4)           A notre arrivée, nous avons pu constater que la salle était remplie. Il y avait plus de 80 avocats qui n’avaient en apparence aucun lien avec l’audience. Ces avocats, la plupart debout, étaient aux  1ère places, empêchant les observateurs de pouvoir suivre le procès. Toutes les places assises étaient également occupées par des civils marocains. Il faut signaler que les autorités ont empêché les observateurs d’entrer dans la salle avant 13h30. Cependant celle-ci était déjà entièrement remplie par les avocats et les civils marocains et la plupart d’entre eux montraient le drapeau du Maroc et les photos du Roi Mohammed VI.


5)           Dans le public il n’y avait aucun saharaoui. Les accusés en liberté provisoire étaient absents. Les avocats de la défense ont indiqué que ces derniers n’avaient pas souhaité venir de peur d’être à nouveau agressés.


6)           Les observateurs ont fait l’objet d’intimidations, d’insultes de la part du public et de certains avocats marocains (« bâtards », « corrompus de l’Algérie », « Pourquoi tu es la ? » « Dehors »). Et les policiers présents se sont refusés d’identifier les agresseurs pour pouvoir les dénoncer. L’avocat française Aline Chanu a été frappée au visage, l’observateur espagnol (Av. Andres Marin) a été bousculé, frappé, sa chemise a été déchirée, certaines personnes du public ont craché sur l’observatrice italienne Alessia Alvino. L’interprète saharaoui de la délégation des observateurs espagnoles, Hamdi Mebarki, a été agressé, puis arrêté, dans la soirée. Après plus de 3 heures d’attente, la police a indiqué aux observateurs qu’il avait été conduit à l’aéroport.  


7)           Les avocats de la défense ont fait l’objet d’intimidations. Ils ont été relégués au quatrième banc derrière les avocats marocains qui étaient venus en nombre. Mustapha Errachidi, avocat marocain et défenseur des accusés, a été pris à parti et accusé de trahison.


8)           La plaidoirie des avocats de la défense a été interrompue à plusieurs reprises. L’entrée dans la salle des accusés a également été accompagnée de cris et de slogans patriotiques. Lors de la  suspension de l’audience, certaines personnes ont même brandi des drapeaux marocains et des photos du roi.


9)           Ce n’est qu’à la reprise de l’audience, pour discuter de la requête de liberté provisoire des accusés, que les débats se sont déroulés dans un calme relatif et les observateurs, qui ont pu rester dans la salle, ont été en mesure d’écouter les plaidoiries. Il convient de préciser que 5 observateurs n’ont pu assister à cette deuxième partie de l’audience car ils ont été poussés en dehors de la salle d’audience par une partie du public et qu’ils ont subi à cette occasion des violences physiques.

 

En conclusion, les observateurs notent que l’audience a été caractérisée par :


-             L’ intimidation des accusés, des avocats de la défense, des observateurs internationaux et, indirectement, des juges.


-             L’absence des accusés en liberté provisoire et de leurs familles et amis saharaouis, l’absence due aux intimidations et violences qui ont eu lieu aux précédentes audiences. En outre, cette absence a été utilisée par le Ministère public pour justifier la nécessité de maintenir en prison les autres accusés.


-             Aussi, dans ces conditions, il ne peut y avoir un procès équitable.       


Casablanca, le 17 décembre 2010


Aline Chanu, Maria Donatella Aschettino, Nicola Quatrano, Paola Russo, Bruno Larosa, Annalisa Senese, Luciano Capuano, Alessia  Alvino, Roberta Galeano, Giovanna Izzo, Louis Ndong

 

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