La sale guerre de l’OTAN et de la Belgique au Proche Orient

Djihadistes belges : au-delà du scandale

Luc Michel


"A Qusseir, des officiers belges, hollandais, français, britanniques ont été capturés"

- Député libanais Assem Qanso (sur Al Nachra)


Lu dans La Libre Belgique (Bruxelles), ce 7 juin 2013 :

« Des Belges auraient aidé à décapiter un homme en Syrie (…) Le parquet fédéral a pris connaissance d'une vidéo dans laquelle des jeunes parlant néerlandais auraient aidé à décapiter un homme nu gisant sur le sol, a indiqué la porte parole du parquet, Lieve Pellens. La vidéo a été postée en juin sous un pseudonyme, sur un site internet proposant d'autres vidéos sinistres. Selon la légende, la victime serait un vieil homme chiite (…) On peut y voir un groupe de jeunes, criant "Allah Akbar" et "Tafkir", se tenant près de l'homme nu pendant que l'un d'entre eux lui coupe la tête avec un couteau. Durant cette scène macabre, on entend clairement des propos en néerlandais avec un accent flamand. On entend une voix dire "tourne-le", suivi d'un "sur son ventre" et de "tiens bien son pied". En plus du néerlandais, on entend également des phrases en français et en arabe. »


 

C’est la vidéo du scandale, la vidéo de trop. Celle qui fait les Unes à Bruxelles, mais aussi à Beyrouth et Damas.


« C’est une vidéo de plusieurs minutes difficilement supportables ( …) La vidéo a été postée le 2 juin sur des sites spécialisés qui présentent des vidéos d’exécution, de faits de guerre ou d’attentats, précise La Libre Belgique. La légende dit qu’il s’agit d’une exécution d’un chiite en Syrie où la guerre civile a pris un tour confessionnel. Les Djihadistes inspirés par Al-Qaïda nourrissent une haine féroce pour les chiites. Et ils sont nombreux à consulter de telles vidéos comme l’avait montré le procès d’une filière Al-Qaïda à Bruxelles en 2004. De jeunes Belges se nourrissaient de telles images. Aucun visage, ni même silhouette des bourreaux ne sont visibles sur la vidéo. Deux objectifs se focalisent sur le corps du supplicié. Mais les voix sont audibles. On entend beaucoup d’Allah Akbar ! (Allah est grand) et d’encouragements qui s’intensifient quand le couteau est placé sous la gorge du malheureux. On sent que l’effet de groupe joue.


Le quotidien bruxellois précise encore : « il est clair que des Belges figurent parmi les bourreaux. Leur accent ne trompe pas. Leurs paroles sont prononcées en néerlandais et en français : "Comme ça, c’est bon", "Tue-le", "Sale chiite" ou encore - en néerlandais - "Tourne-le", "Mets-le sur le ventre". »


Selon la porte-parole du parquet fédéral belge, la vidéo n'était pas encore connue du parquet. "C'est une nouvelle information pour nous" (sic), explique Lieve Pellens. "Elle va être examinée dans le cadre de l'enquête judiciaire menée actuellement par le juge d'instruction d'Anvers sur différents membres de Sharia4Belgium ".


C’est le dernier épisode du feuilleton des « djihadistes belges » qui secoue le royaume. Episode faisant partie du gros dossier des djihadistes de l’UE partis combattre en Syrie dans les rangs de l’ASL. Une centaine de belges – beaucoup de jeunes, et une part de flamands et bruxellois de souche convertis – selon Bruxelles, moins d’un millier de ressortissants de l’UE selon l’OTAN. En réalité 6.000 ou 7.000 – dont 800 belges – selon nos sources syriennes et libanaises.


Le vraie scandale derrière l’anecdote de presse. A Qusseir des officiers belges, hollandais, français, britanniques, qataris capturés

Mais le vrai scandale, celui que personne n’évoque à Paris ou Bruxelles, n’est pas celui des djihadistes, salafistes et autres paumés de Sharia4Belgium partis en Syrie.
C’est qu’ils étaient là bas encadrés par des officiers des forces spéciales de l’OTAN, dont des officiers belges et néerlandais.

A Qusseir, des officiers belges, hollandais, français, britanniques, qataris ont en effet été capturés !
Selon le journal libanais Al Nachra (fin mai 2013) – infos choc soigneusement occultées dans les médias de l’OTAN -, citant un député du parlement libanais, "des officiers français, britanniques  belges, hollandais, qataris ont été arrêtés au cours des combats à Qusseir alors que l'étau continue de se resserrer autour les terroristes d'Al Nosra."

Assem Qanso (1), député du parti Ba’aths socialiste libanais (2) qui se confiait à Al Nachra , ajoute que « le nombre de ces officiers étrangers s'élève à des dizaines. le chef d'Al Nosra Abou al Walid a été tué alors qu'il combattait au milieu de ces officiers étrangers ... 36 villages situés dans la banlieue de Qusseir ont été libérés et l'armée arabe syrienne  a réussi en deux jours de combats à nettoyer les régions du nord ouest de la ville ce qui veut dire que les voies d'approvisionnement d'Al Nosra depuis Arsal et Homs sont totalement coupées ». Selon ce député libanais de premier plan, des milliers de terroristes se sont rendus et près de 18 libanais, tous des partisans du cheikh Salem Al Rafaï, le religieux salafiste libanais ont été arrêtés. Il y a aussi des salafistes libanais tués ou encore arrêtés. « Chaque famille libanaise qui a envoyé son fils au front du combat contre la Syrie a reçu 50000 dollars ». Le député s'inquiète aussi du retour des dizaines de combattants salafistes au Liban . « Le Liban ne peut pas tolérer éternellement ces éléments sur son sol surtout quand ils sont équipé d'armes et de munition ».


Mais que font les Belges et les Néerlandais en Syrie ?

Pourquoi des belges et des Néerlandais ? Parce que justement le gros contingent des djihadistes venus de l’UE provient de Belgique et singulièrement de Flandre. Et que ces jeunes sans éducation ne parlent pas l’arabe mais juste le Néerlandais.


On comprend mieux aussi la soudaine modération des belges lors de la dernière réunion de l’UE à Bruxelles fin mai. A Bruxelles ce 27 mai, les 27 de l’UE examinaient en effet la question de la levée de l'embargo sur les armes à destination de la pseudo « opposition syrienne ». Mis en place il y a deux ans, l’embargo européen, y compris sur les armes, expirait fin mai. Londres, le cheval de Troie US dans l’UE, a revendiqué le droit d’agir seul pour aider les opposants syriens. Paris a appuyé ce chantage. Les modérés l’ont accepté.


Curieusement – ou pas ? -, la Belgique est passée du camps des bellicistes à celui des modérés. Alors que le ministre belge des affaires étrangères Reynders était l’un des chiens enragés de l’UE-NATO contre Damas, le voilà soudainement devenu très modéré. Il va en effet falloir négocier avec Damas …


Qousseir nid de barbouzes

Qousseir, base principale à la fois de la pseudo ASL et d’ al-Nosra (al-Qaida en Syrie), ville stratégique entre Damas, le pays alouite et le nord-Liban, était aussi un « nid d’espions ».
Outre les forces spéciales de l’OTAN venues encadrer les djihadistes de l’OTAN, on y trouvait aussi les barbouzes de Tsahal et du Mossad.


« Les membres des forces spéciales de l’armée sioniste viennent d’entrer à Al Quasseir où les terroristes d’Al Nosra et de l’ASL sont encerclés par les soldats de l’armée nationale », écrivait encore Al Khabar press. « Des forces spéciales israéliennes arrivent expréssement pour venir en aide des terroristes d’Al Nosra . ils ont traversé les frontières du côté libanais et cherchent à empêcher l’avancée des soldats de l’armée syrienne ».


Il s’agissait en effet d’éviter une victoire des loyalistes à Qousseir (libérée ce 6 juin) : « Al Quasseir est la principale base des terroristes en action contre l’Etat et l’armée syrien. c’est une ville qui entre dans la cinquième semaine de son siège par les forces de l’armée nationale. si l’Armée syrienne parvient à entrer dans la ville, l’un des principaux artères d’approvisionnement des terroristes sera coupé au risque de mettre hors jeu le front terroriste d’Al-Nosra ».


Le jeu vicieux de l’OTAN avec les islamistes radicaux

Mais revenons à nos djihadistes belgo-flamands. Un dossier pourri qui illustre tragiquement la politique incohérente de l’OTAN envers les islamistes radicaux … Dénoncés à Bruxelles ou Paris. Combattus en Afghanistan. Mais financés et armés comme alliés et infanterie coloniale de l’OTAN en Libye, en Syrie, au Mali, ou encore dans le Caucase contre la Russie.

Tout cela se paye déjà en Afghanistan et au Mali avec le sang de jeunes européens, livrés au Moloch yankee pour mener une guerre néocoloniale, qui est avant tout une guerre contre la Grande-Europe !


Le groupe salafiste et criminel « Sharia4Belgium », branche d’un réseau islamiste - basé à Londres, « Sharia4uk » – et implanté dans toute l’UE, illustre ce jeu pervers ! Longtemps toléré par les polices politiques belges et de l’OTAN. Et sous les feux de l »actualité depuis les émeutes islamistes à Bruxelles du printemps 2012. « Durant la même soirée du 31 mai, une émeute avait eu lieu devant le commissariat de police molenbeekois (une des 19 communes de Bruxelles) de la rue du Facteur, après que Shariah4Belgium, un mouvement islamiste radical (…) a appelé à des actes de protestation. Durant les jours suivant ces deux événements, les rues de la commune bruxelloise furent agitées. Un extrémiste musulman parisien avait même poignardé deux agents de police dans la station de métro Beekant », écrivait alors La Libre Belgique.


Depuis, après avoir bénéficié d’une publicité médiatique indécente sur les tous les médias belgicains, TV incluses, Sharia4Belgium s’est ensuite révélé comme une des filières principales de recrutement des djihadistes vers la Syrie …


Les autorités judiciaires, commente La Libre Belgique, « qui savaient que des membres actifs de Sharia4Belgium étaient en Syrie depuis août dernier, soupçonnaient de longue date que certains avaient pris part à des exécutions. Le parquet fédéral l’avait indiqué après l’arrestation de Fouad Belkacem (leader du groupuscule islamiste) le 16 avril dernier : "Ils auraient rejoint en Syrie des groupes de combattants aux idées salafistes djihadistes inspirées par Al-Qaïda. Ils participeraient à des combats et même à l’enlèvement et à l’exécution de ce qu’ils appellent des "mécréants". Cette conviction s’appuyait sur des écoutes téléphoniques (…) signalant que son groupe avait décapité un homme qu’il avait enlevé, initialement pour une rançon. »


Comme au Sahel, la vague djihadiste de l’UE répond au mauvais signal des USA et de l’OTAN

Le déclencheur de l’activisme terroriste des djihadistes au Sahel et au Maghreb comme en Europe est en effet la réponse à un signal fort, et extrêmement irresponsable, donné depuis plus de deux ans par les USA et l’OTAN : la collaboration des services spéciaux de l’OTAN, et singulièrement de la CIA, des français et des britanniques, avec des leaders d’Al-Qaida et d’AQMI, sa branche nord-africaine, en Libye, en Syrie et en Algérie.


On ne le répétera jamais trop, la vision, exemple emblématique, d’un ancien de Guantanamo, Abdelhakim Belhadj, adoubé par les généraux de l’OTAN, français en tête, comme « gouverneur militaire de Tripoli » en Août 2011 est un mauvais signal donné à tous les djihadistes. Relire les déclarations délirantes des généraux français de l’OTAN lors de la prise de Tripoli en Août 2011…

Le même Abdelhakim Belhadj fut ensuite chargé de mission contre Damas en novembre 2011, à la tête d’une brigade en Syrie, basée en Turquie, et dont les camps d’entrainement étaient précisément organisés en Libye avec la bénédiction du CNT et de ses protecteurs de l’OTAN.


Le scenario du diable

Les USA, l’OTAN et singulièrement la France payent cash le prix fort pour cette politique aventuriste et irresponsable.

Et ce n’est que le début. Les djihadistes ont le vent en poupe, disposent maintenant de relais forts et de gouvernements favorables en Libye, Egypte, Tunisie et Maroc. Où les Salafistes et les Frères musulmans dominent maintenant la vie politique. Toujours sous la protection de généraux « arabes » protégés des USA et de l’OTAN.


A cela s’ajoutent le pillage des arsenaux libyens par les « katibas » djihadistes du CNT et la vente par les dirigeants corrompus du CNT libyen d’un impressionnant arsenal à AQMI aux début du coup d’état en Libye, en mars-mai 2011 (notamment des ventes de missiles exposées par le Canard Enchainé à Paris, à l’époque).


Sans oublier aussi la Centrafrique, où les occidentaux, pas échaudés apparemment par les désastres libyen et malien, ont rejoué le scénario maudit, le scénario du diable, installant au pouvoir la Séléka et ses islamistes ; via un nouveau CNT (3). On comprend mieux alors le nom du pouvoir « de transition » installé au pouvoir en Centrafrique – et que Paris aurait pu balayer sans problème -, ce CNT inspiré du CNT libyen de Benghazi …


Derrière ce scénario du diable, il y a le projet géopolitique américain, celui des néocons de Bush réactivé par Obama, dit du « Grand Moyen Orient ». Au sens de plus en plus large et où l’Afrique est devenue l’arrière cour de ce « Grand Moyen Orient » remodelé et de sa cible géostratégique, le contrôle de l’Eurasie, clé d’un « XXIe siècle américain ». Dans ce projet la tactique est simple, toujours la même : allier dans un état faible ou fragmenté un pouvoir militaire et des forces islamistes, tous deux gagnés à l’économie libérale (la première caractéristique des Frères musulmans, par exemple, est leur hostilité absolue au Socialisme). Pour arriver cela, il faut évidemment s’allier au diable djihadiste !


La schizophrénie criminelle des USA et de l’OTAN jusqu’à Bruxelles

La politique des USA et de l’OTAN, dont la France des Sarkozy et Hollande – qui a enterré la politique du générale de Gaulle aussi bien au niveau européen qu’arabe – réintégrée dans l’OTAN est le bon élève servile, peut être qualifiée de schizophrénique. Chaque jour de jeunes soldats sont sacrifiés en Afghanistan, en Irak ou au Mali pour combattre des djihadistes. Que par ailleurs on a armés et organisés, comme allié principal, en Libye ou en Syrie. Incohérence ou cynisme …


Schizophrénie qui touche aussi les services spéciaux de l’OTAN. Ainsi les branches Sécurité intérieure des Services français, britanniques ou belges, qui doivent suivre les djihadistes et autres salafistes en Europe, doivent regarder d’un drôle d’œil leurs collègues des branches Action extérieure et du Service Action qui ont encadré et armé les mêmes islamistes en Libye ou le font encore contre la Syrie. En particulier les barbouzes française qui ont organisé les livraisons d’armes aux Brigades de Zenten et de Tripoli en juin 2011, avant de remettre la capitale libyenne à leur chef Abdelhakim Belhadj. Où les officiers belges, hollandais, français, britanniques qui ont été capturés à Qousseir …


Cette schizophrénie touche aussi toute la classe politique belgo-flamande (à l’exception des républicains flamands). Mais aussi magistrats, élites ou policiers. Qu’attendre encore lorsque que le porte-parole du Parquet fédéral belge, compétent en matière de terrorisme, ose déclarer ce qui suit (16 avril 2013) : « le parquet fédéral a souligné l'importance de s'attaquer aux structures et aux groupes qui permettent à des jeunes Belges de se rendre en Syrie. Il précise toutefois qu'il ne faut pas mettre tous les jeunes partis en Syrie dans le même panier, soulignant que certains cherchent à protéger la population civile (sic) et à renverser le régime en place pour le remplacer par un État démocratique (resic). » ?



NOTES :

(1) Assem Qanso (écrit aussi Assam Ghansou) (né à Baalbek en 1937) est un homme politique libanais de confession musulmane, leader du parti Ba’ath au Liban. Il a effectué des études d'ingénieur en Yougoslavie (1963, mines et géologie) puis en Roumanie (pétrole et géologie).
Il rejoint le Ba’ath libanais en 1953. Durant la guerre du Liban, la branche libanaise du parti est divisé en deux groupes hostiles: le Ba’ath syrien et le Ba’ath irakien. Qanso est résolument ba’athiste syrien. Qanso était un opposant farouche à la pseudo «  révolution du cèdre ». Il ne sera pas réélu au parlement libanais en 2005. Il ne doit pas être confondu avec Ali Qanso, chef du Parti social nationaliste syrien (PSNS).


(2) Le parti Ba’ath arabe et socialiste, créé en 1956, est la branche du parti Ba’ath syrien au Liban. Fayez Chkor, chef du Parti Ba’ath Arabe Socialiste au Liban, et Assem Qanso sont les deux leaders du parti.
On notera encore le front politique et électoral qui unit au Liban même le Hezbollah, la branche libanaise du Parti Ba’ath Arabe Socialiste et leurs alliés musulmans progressistes et nationalistes chrétiens Il y a aussi un Parti Ba’ath irakien, avec une branche libanaise, héritage de la rivalité suicidaire entre les deux capitales ba’athistes Damas et Bagdad.


(3) Cfr. Luc Michel, Seleka et crise en Centrafrique : le dessous des cartes
sur
http://www.eode.org/eode-think-tank-geopolitique-seleka-et-crise-en-centrafrique-le-dessous-des-cartes/

Add comment


Security code
Refresh

accueil
Dichiarazione per la Privacy - Condizioni d'Uso - P.I. 95086110632 - Copyright (c) 2000-2024