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Arrêt Sur Info, 8 avril 2016
 
Les crimes de l’occupant israélien ne suscitent qu’un honteux silence
Maureen Clare Murphy
 
Les six derniers mois de violence qui ont coûté la vie à plus 200 Palestiniens et 30 Israéliens, ont surgi dans un «contexte préexistant» d’une «occupation qui dure depuis des décennies».
 
 
Ainsi s’exprimait devant le Conseil des droits de l’homme à Genève ce lundi, Makarim Wibisono, rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits de l’homme en Cisjordanie occupée et dans la bande de Gaza. Dans son dernier discours en tant que rapporteur spécial – Wibisono a démissionné plus tôt cette année pour protester contre le refus d’Israël de lui donner accès à la Cisjordanie et à Gaza – le diplomate indonésien a déclaré :
 
    «Depuis que j’ai pris cette fonction à l’été 2014, j’ai été frappé par l’abondance de l’information documentant les violations des droits humains internationaux et du droit international humanitaire, et d’une apparente incapacité de la communauté internationale à traiter une situation bien connue en œuvrant pour une meilleure protection des Palestiniens.»
 
Wibisono a particulièrement condamné l’utilisation excessive de la force par Israël dans le cadre d’attaques présumées, qui ont abouti à la mort d’un grand nombre de Palestiniens, y compris des dizaines d’enfants.
 
Vidéos d’exécutions sommaires
Des vidéos sont diffusées sur une base presque hebdomadaire montrant des soldats et des miliciens israéliens utilisant une force meurtrière contre les Palestiniens – y compris des écolières – alors que ceux-ci ne posent pas de danger immédiat pour la vie de quiconque, ou montrant des Palestiniens abandonnés sur le sol se vidant de leur sang, sans qu’il y ait aucune tentative d’administrer les premiers soins.
 
Et pourtant, il y a eu peu de condamnation d’Israël, à l’exception de la ministre des Affaires étrangères de la Suède qui a demandé une enquête sur ces meurtres assimilables à des exécutions sommaires, provoquant la colère du Premier ministre Benjamin Netanyahou.
 
Les forces israéliennes continuent d’abattre les Palestiniens chaque semaine, affirmant que ceux-ci auraient attaqué ou tenté d’attaquer des soldats ou des civils. Dans de nombreux cas, aucun Israélien n’a été signalé comme étant blessé lors de ces attaques dans lesquelles les présumés assaillants palestiniens ont été abattu.
 
L’un des derniers de ces meurtres – dans une liste qui est longue – a été filmé, montrant Mahmoud Abu Fanounah, âgé de 21, gisant sur le sol et perdant son sang alors qu’aucune tentative n’est faite pour sauver sa vie :
 
 
Dans la vidéo, une voix peut être entendue disant en hébreu que le jeune Palestinien est un terroriste qui avait tenté d’attaquer un combattant israélien avec un couteau.
 
Abu Fanounah a été abattu vendredi à la jonction de Gush Etzion – l’entrée du bloc de colonies du même nom qui a été le site de plusieurs incidents meurtriers ces derniers mois en Cisjordanie.
 
Un porte-parole de l’armée israélienne d’occupation a déclaré à l’Agence de nouvelles Ma’an qu’un «assaillant armé d’un couteau est sorti de son véhicule et a attaqué des soldats» qui ont ensuite ouvert le feu et tué l’homme.
 
Aucun Israélien n’a été blessé lors de l’incident.
 
Un témoin a déclaré à l’agence Ma’an que Abu Fanounah, originaire de la ville voisine d’Hébron en Cisjordanie, ne portait aucune arme quand il a été abattu.
 
Ma’an a ajouté que «Hisham Abu Shaqra, journaliste pour l’agence turque Anadolu, a été arrêté par les forces israéliennes d’occupation après avoir pris des images de l’incident».
 
Abu Fanounah rentrait de son travail à Bethléem quand il a été abattu de sang-froid, a déclaré sa famille au site d’informations al-Quds.
 
Al-Quds a noté que le père du jeune homme tué, Muhammad Ahmad Abu Fanounah, est un représentant de la faction du Jihad islamique [résistance islamique] en Cisjordanie et est actuellement détenu sans inculpation ni jugement en vertu d’un ordre de détention administrative prononcée par un tribunal militaire israélien.
 
Un autre jeune Palestinien de Hébron, Abdullah Muhammad al-Ajlouni, âgé de 18 ans, a été tué le lendemain.
 
La police israélienne d’occupation a affirmé que al-Ajlouni avait brandi un couteau face à un soldat à un poste de contrôle qui lui demandait sa carte d’identité, causant des blessures légères à la tête du soldat avant d’être abattu.
 
Des témoins ont déclaré à l’agence Ma’an que les forces israéliennes «avaient littéralement douché» al-Ajlouni avec des coups de feu.
 
La famille refuse une dépouille totalement congelée
Ce lundi soir, une famille de Jérusalem a refusé de recevoir le corps de l’un de ses membres quand il leur a été renvoyé par Israël complètement congelé.
 
Nous avons accepté les conditions fixées par l’occupation [israélienne] afin que nous puissions l’enterrer dans la dignité, et notre seule demande était que le corps ne soit pas gelé», a déclaré à Ma’an l’oncle de Hasan Khalid Manasra.
 
Hasan Khalid a été abattu en octobre quand lui et son cousin Ahmad ont conduit une attaque au couteau dans la colonie juive de Pisgat Zeev à Jérusalem, dans laquelle deux Israéliens, âgés de 13 et 21 ans, ont été grièvement blessés.
 
Ahmad Manasra avait été heurté par une voiture lors de l’incident et la vidéo de la scène montre des Israéliens l’injuriant et appelant à sa mort alors qu’il se trouve sur le sol, son corps déformé en raison de ses graves blessures.
 
 
Ahmad Manasra est actuellement en prison en Israël et a été accusé de tentative de meurtre.
 
La même nuit où la famille de Hasan Manasra a refusé le corps gelé de son garçon, Israël a transféré les restes d’Omar Iskafi, abattu par la police israélienne à Jérusalem en décembre.
 
Iskafi, âgé de 21 ans, a été abattu au cours d’une attaque présumée en voiture puis avec des coups de couteau, qui auraient laissé deux Israéliens légèrement blessés.
 
La famille du jeune homme a nié qu’il ait tenté une attaque quand il a été tué.
 
«Les forces israéliennes se déployées massivement autour du cimetière … lors des funérailles de Iskafi, et les soldats ont uniquement autorisé à accéder au cimetière les membres de la famille dont les noms figuraient sur une liste», a rapporté Ma’an.
 
Plus tôt ce mois-ci la famille de Mutaz Uweisat, un jeune garçon palestinien tué par les forces israéliennes près d’une colonie juive dans Jérusalem en octobre, a déposé une requête devant la haute cour d’Israël pour exiger une autopsie.
 
Le corps du garçon a été retenu par Israël depuis lors, et les autorités d’occupation ont par ailleurs refusé de retourner à leur familles, les dépouilles de plusieurs autres Jérusalémites tués.
 
Dans le cadre d’une série de mesures répressives approuvées par le gouvernement à la mi-octobre, Israël retient en ce moment les corps de plus de 80 Palestiniens tués lors d’attaques présumées.
 
Le responsable d’un institut médico-légal palestinien a déclaré que le traitement par Israël des corps rendait impossible de procéder à une autopsie.
 
La congélation des corps à des températures extrêmes «empêche toute autopsie qui permettrait d’étudier les circonstances du crime, ce qui signifie une perte d’informations importantes pour amener Israël devant la Cour pénale internationale», a déclaré en décembre Sabir al-Aloul de l’Institut universitaire Al-Qods de médecine légale.