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Convention Cadyst-Invest-DEG

Les Allemands cautionnent de 4 milliards de francs Cfa la relance de l’industrie du médicament essentiel au Cameroun. Le groupe camerounais CADYST-Invest a osé investir dans un secteur stratégique contrôlé sans partage depuis l’indépendance par des systèmes occidentaux.

Jean Marc Soboth

Le président du groupe CADYST-Invest, Célestin Tawamba, a procédé vendredi 20 mars 2009 à Douala à la signature solennelle d’une convention de prêt d’une valeur totale de 8 milliards de francs Cfa avec la société allemande d’investissement et de développement, DEG, et un pool de banques locales, parmi lesquelles figurent la Commercial Bank of Cameroon (CBC), ECOBANK et la Banque Internationale pour le Crédit et l’Epargne du Cameroun (BICEC), filiale du groupe Banque Populaire.
La DEG dont l’intervention au Cameroun marque, peut-être, un come back de l’investissement allemand au Cameroun après le précédent politico-judiciaire Reemtsma Cigaretten Fabriken/Sitabac apportera, dans le cadre de ladite convention, 6 millions d’euros, soit 4 milliards de francs Cfa en garantie des financements bancaires nécessaires à l’opération dite de « modernisation et mise aux normes » de la Compagnie Industrielle Pharmaceutique, CINPHARM, filiale du groupe CADYST-Invest, holding industrielle créée en 2006, qui, la même année, avait pris le contrôle du site de production de l’ancienne Rhône Poulenc Santé Industrie (RPSI) dans la zone de Makèpè.
Le projet CINPHARM S.A a, d’après ses promoteurs, pour ambition l’édification de « la toute première usine de production de médicaments génériques dans l’histoire de l’Afrique centrale ». Appuyé par le « partenariat technique et de transfert de technologie » du groupe indien CIPLA, l’un des leaders mondiaux en matière de fabrication de génériques, CINPHARM produira annuellement plus d’1 milliard de comprimés antipaludéens, antirétroviraux, antituberculeux, antibiotiques, analgésiques, ainsi que des médicaments contre les maladies gastro-intestinales.
D’après les responsables de CADYST-Invest, les usines de Makèpè mettront sur le marché du médicament pas moins de 13,5 millions de poches de soluté en plastique – destinées notamment aux poses de perfusion -, 7 millions de flacons de sirop et 60 gammes thérapeutiques, qui viendront s’ajouter aux 3,5 millions de poches de soluté déjà produites par la Société Industrielle des Produits Pharmaceutiques, SIIP, une autre filiale de CADYST-Invest dotée d’un chiffre d’affaires de 1,7 milliards de francs Cfa.
Depuis plusieurs mois, les responsables de la holding à capitaux majoritairement camerounais ont, avec l’appui de techniciens et d’une main-d’œuvre camerounaise et indienne, investi plusieurs milliards de francs Cfa dans la réhabilitation du site désaffecté de l’ancienne usine Rhöne-Poulenc à Douala.

Secteur industrie de poids. « Notre engagement apporte ainsi une contribution décisive à la relance durable de la production pharmaceutique comme secteur industriel de poids en Afrique centrale francophone. CADYST-Invest a déjà fait preuve de grandes compétences dans la restructuration d’entreprises dans les secteurs variés », a déclaré à cet effet Philipp Kreutz, membre du conseil de gestion de la société allemande DEG, filiale de la KfW bankengruppe - en 2008, DEG a accordé des cautionnements d’une valeur de 33 millions d’euros (22,6 milliards de francs Cfa) pour financer les investissements dans les pays en voie de développement et émergents.
Mais tout, on peut l’imaginer, ne sera pas rose dans la mise en œuvre de cette industrie « de fierté nationale » du domaine de la santé si l’Etat ne s’investit pas pour lui assurer « la protection régalienne nécessaire ». L’investissement dans le « domaine de souveraineté » que constitue l’industrie pharmaceutique charriera, en effet, une action automatique des industries européennes distributrices en Afrique des bons et des faux médicaments et qui, dans la sous-région, ont évolué en situation monopolistique depuis les indépendances.
La corruption des fonctionnaires étant la principale arme de tous les combats pour la neutralisation des industries locales, une ligne réaliste de l’Etat s’avérera indispensable pour la réussite du projet. Les responsables de CADYST-Invest, qui disent avoir bénéficié, entre autres, de l’assistance du gouverneur de la région du Littoral, Francis Fai Yengo, dans ce processus, affichent déjà, sur la question, un optimisme béat.